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L'interview d'un «manifestant professionnel» par Jean Yanne en 1970

L'interview d'un «manifestant professionnel» par Jean Yanne en 1970

Manifester, c'est un métier. En tout cas dans ce sketch provocateur et hilarant de Jean Yanne et de son complice Daniel Prévost. Confection des banderoles, apprentissage de slogans ou lancer de pavés, arpenter les rues ne s'improvise pas.

 

Par Florence Dartois - Publié le 04.12.2019 - Mis à jour le 31.01.2023
 

L'ACTU.

Les Français sont appelés à descendre dans la rue le 31 janvier pour protester contre la réforme des retraites présenté par le gouvernement. Contrairement au droit de grève, le droit de manifester n'est pas inscrit dans la Constitution française, mais la « manif » fait partie de l'ADN français. C'est sans doute en partant de ce constat que Jean Yanne et Daniel Prévost ont imaginé le sketch que nous vous proposons de découvrir en tête d'article et qui fut diffusé dans l'émission « La joie de vivre » du 16 mars 1970.

L'ARCHIVE.

Dans ce sketch impertinent, Jean Yanne interviewait un militant, joué par Daniel Prévost, qui se présentait comme « un manifestant professionnel ». C'est d'ailleurs le titre de cette saynète jouée, en direct et en public. Sa profession plutôt originale et très altruiste, expliquait-il, consistait à manifester « à la place de ceux qui travaillent ».

Mais on ne devenait pas manifestant professionnel par hasard, poursuivait Daniel Prévost, ce spécialiste du pavé précisait qu'il fallait « d’abord faire des études » pour être habilité à défiler dans des réunions de toutes les tailles, « jusqu’au meeting ». Un vrai sacerdoce, effectivement, puisque ce citoyen compatissant ajoutait se plier à une discipline de fer, enchaînant les défilés.

Une formation pointue

Ce niveau d'abnégation professionnelle ne s'obtenait qu'après deux ans d'études sérieuses dans une grande école, « l'IDEM » (Institut des Hautes Études des Manifestations). Le contestataire rigoureux expliquait d'ailleurs à Jean Yanne en quoi consistait ce cursus. Comme dans n'importe quelle formation, les cours de la première année étaient avant-tout théoriques : apprentissage et « confection de banderoles, de slogans... ».

Les choses sérieuses débutaient la deuxième année, avec les travaux pratiques : « formation de cortège, déformation de cortège », la formation proposait aussi des stages dans des groupes « de gauche ou de droite ». D'autres cours étaient incontournables pour se lancer dans les cortèges : le « lancement du pavé » et bien-sûr, la « protection contre la matraque ». En option, l'« utilisation du couvercle de poubelle » compléterait cette formation. Sans oublier l’indispensable apprentissage de « la confection de cocktails Molotov ». La tenue du manifestant professionnel, notamment le port de casque, serait, elle aussi, enseignée avec sérieux.

Comme pour tout cursus, en fin d’année, un diplôme récompensait les meilleurs élèves, avec la remise de prix comme « le prix Georges Séguy » (résistant et syndicaliste français, 1927-2016), qui « récompense le meilleur manifestant de gauche ou le meilleur coupeur de courant », précisait le manifestant, ou le « prix Tixier-Vignancour (avocat et homme politique français d'extrême droite, 1907-1989), récompensant « le meilleur manifestant de droite et de remise du courant », ironisait Jean Yanne.

En manifestant zélé, Daniel Prévost mettait un terme à cette entrevue instructive en annonçant devoir se rendre à deux rassemblements consécutifs. La chute du sketch fera beaucoup rire le public présent ce jour-là...

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