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Avortement : les mots de Gisèle Halimi face à une opposante

Avortement : les mots de Gisèle Halimi face à une opposante

En 1974, Gisèle Halimi, avocate et figure du féminisme, défendait avec vigueur le droit à l'avortement, parfois même face à des femmes.

 

Par la rédaction de l'INA - Publié le 29.07.2020 - Mis à jour le 04.03.2024
 

L'ACTU.

Lors du vote en Congrès de l'inscription de l'IVG dans la Constitution le 4 mars 2024, le premier ministre Gabriel Attal a rendu hommage à Gisèle Halimi. Une manière d'honorer le combat qu'elle mena pour la légalisation de l’avortement et la lutte contre les injustices faites aux femmes. Au cours de sa carrière, l'avocate décédée en juillet 2020, dut affronter les préjugés concernant l'avortement à une époque où l'IVG était illégale et où l'opposition était puissante, tant du côté des hommes que de la gent féminine, comme le montre l'archive en tête d'article.

L'ARCHIVE.

Le 8 janvier 1974, dans l'émission « Aujourd'hui madame », Gisèle Halimi confrontée à une femme pro-avortement, prononçait un vibrant plaidoyer en faveur de l'interruption volontaire de grossesse. Elle répondait dans un premier temps sur la notion d'éthique soulevée par la femme, qui lui demandait si le texte de loi était une amélioration, en comparant l'avortement à un crime autorisé par la loi. Une oi qui autoriserait les femmes à « tuer » leur fœtus, « qu'est-ce que vous allez faire à cette femme, alors que vous donnez l'absolution à celle qui aura tué son enfant dans son ventre ? C'est une contradiction ! », argumentait-elle.

Très calmement, avec pédagogie, l'avocate allait apporter une réponse où chaque mot serait pesé, démontant l'argumentation de l'opposante : « Moi, je trouve qu'il faut vraiment le répéter. Je le répéterai autant de fois que j'en aurais la force, pour que ça soit dit une fois pour toutes et compris. Nous ne faisons pas de croisade pour l'avortement ! Nous nous battons pour que les femmes soient libres de choisir leur maternité. Ça, c'est fondamental.

Gisèle Halimi se lançait ensuite dans un plaidoyer pour le libre-arbitre, la liberté de penser et d'agir : « Et l'important, voyez-vous madame, c'est que si moi, je suis libre de choisir mes maternités, vous, avec les conceptions que vous aurez, que j'ignore, mais que je crois deviner. Que quelles que soient vos convictions philosophiques, religieuses, morales, vous aurez comme moi le droit de choisir. Je veux dire que si vous vous entendez ne jamais avorter et avoir un enfant chaque fois que vous aurez un rapport sexuel, c'est votre affaire. Ce qui est intolérable, c'est que vous, ayant fait ce choix, vous ayez la prétention de l'imposer aux autres ».

Un enfant si je veux

Le visage fermé de son interlocutrice, sa bouche pincée, n'allait pas empêcher l'avocate de poursuivre sa « plaidoirie » et d'évoquer le travail des associations comme « Choisir », un mouvement apolitique, qui avait permis d'inclure dans le débat la question de la contraception et l'éducation sexuelle : « toutes celles et tous ceux qui, comme vous, se sont battus contre la contraception, contre l'éducation sexuelle. On peut dire que nous avons remporté ce succès-là. L'Éducation sexuelle, il me semble qu'on la met en place. Peut-être pas très bien d'ailleurs, mais enfin, ça vient. La contraception, je n'ai pas trouvé d'adversaires de la contraception ».

Gisèle Halimi estimait que l'autorisation de l'IVG ne pouvait passer que par un accompagnement en matière de contraception, « En tout cas, aujourd'hui, on dit oui à la contraception, mais pas à l'avortement. Mais soyons logique ! » Elle expliquait que l'avortement était l'ultime recours lorsque la politique préventive, incluant la contraception, était un échec. L'avocate ajoutait un argument phare du féminisme, celui de permettre à la femme d'être maîtresse de son corps et de sa maternité : « Il faut bien permettre à une femme d'avoir des enfants qu'elle désire ».

Gisèle Halimi concluait sa démonstration en essayant de ne pas opposer le statut de femme et de mère, évoquant : « une escroquerie » ajoutant, « Je parle en tant que mère et que femme, que vous séparez. Pour moi, mère, femme, avocate, militante, politique, tout ça, c'est la même chose. Je ne suis pas à tiroirs. Je suis un être humain, que je voudrais être à part entière. Et je voudrais que toutes les femmes le soit. Je n'ai pas de cloisonnement, donc ma bataille, c'est la même. Je n'ai pas changé, alors je trouve que vous n'avez pas le droit de dire que lorsqu'un spermatozoïde rencontre par hasard un ovule, il y a un enfant. C'est une escroquerie fondamentale. »

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